SIRENH : Imaginaires nationaux et circulations transnationales

Afin d’étudier les mises en récit contemporaines de l’histoire, le SIRENH s’attache à observer les changements épistémologiques, les contextes politiques et les évolutions sociales qui génèrent des catégories pour nommer ou caractériser acteurs et évènements du passé. Avec elles, de nouvelles matrices explicatives – et, par voie de conséquence, de nouveaux dispositifs narratifs – se constituent. Films et romans, récits historiographiques et témoignages, écrits de presse et narrations muséales, participent de différentes manières à ce travail de reformulation qui atteste, en outre, de la coexistence de mémoires en conflit (E. Jelin) hégémoniques ou contre-hégémoniques. A ce premier objectif se joint une volonté de réfléchir aux enjeux théoriques de ces approches du passé où le rapport entre narration, histoire et fiction ne cesse pas d’être  interrogé et mis en question.

Les projets menés à bien entre 2013 et 2018 ont conduit les membres du SIRENH à s’intéresser aux représentations du temps qui président leurs recherches, d’où l’intérêt porté à des catégories telles que « régimes d’historicité », « présentisme », « contemporain », « temps présent », « mémoire », « commémoration », « post-mémoire » ou encore « catastrophe ». Une importance accrue des dynamiques transnationales dans la gestion collective des passés nationaux a été constatée au cours de ces réflexions. La gestion des passés et la production de la mémoire se sont majoritairement développées dans les limites de l’Etat-Nation (A. Assmann) ; or, l’impact de la globalisation a bouleversé ces anciens cheminements menant à la constitution progressive d’une mémoire transculturelle (A. Erll).

C’est pourquoi, ces dernières années les séances du séminaire ont été consacrées à une nouvelle thématique commune : « Imaginaires nationaux et circulations transnationales ». Pour mieux cerner la portée des redéfinitions en cours de ces cadres nationaux, locaux, régionaux et transnationaux, ce nouveau volet des recherches du SIRENH se propose d’étudier une constellation de concepts qui ont aidé à tracer les contours du cadre national au cours de l’histoire contemporaine: internationalisme, régionalisme, cosmopolitisme, lien colonial, rapport néocoloniaux, culture globale, tournant transnational. Ce travail de définition suppose une approche généalogique de ces concepts, afin de les situer dans des contextes historiques et configurations précis et de saisir les débats culturels et politiques auxquels ils ont donné lieu.

L’étude de ces « dehors » de la nation conçue comme un système culturel (H. Bahbha) lié à des récits fondateurs (B. Anderson, S. Sand), a pour but fondamental de cerner la place des imaginaires nationaux dans la construction des identités collectives au fil de l’histoire contemporaine des sociétés étudiées, ainsi que leur rôle dans la constitution du lien social à l’heure où les frontières mêmes de Etats et la définition des collectifs nationaux évoluent. Il s’agit là d’un défi majeur posé par les évènements politiques qui bouleversent les premières décennies du XXIe siècle (mouvements indépendantistes ou autonomistes, création de collectifs transnationaux des peuples autochtones défiant le tracé des frontières des tout récents états nations, exils, migrations, déplacement de populations ; arts, littérature, recherche délocalisés par les réseaux virtuels ; redéfinitions liées aux effets de la pandémie).